— Les humains, à quoi ressemblaient-ils ?
— À nous, puisqu'ils nous avaient créés à leur
image, à l'exception du sommet du crâne recouvert de longs poils.
— Comme les deux que j'ai vus dans ton
jardin ?
— Il n'y a personne dans mon jardin, jeune plomb-bot.
Je te conseille de te mêler de tes oignons !
Ignorant de quoi il s'agissait, le réparateur prit
cela comme une menace et n'insista pas. Les robots, confrontés à une situation
qui les dépassait, employaient souvent ces expressions obscures empruntées aux
humains sans en connaître le sens.
— L'autre fois, j'ai dû me mettre en veille,
impossible de recharger. Que se passe-t-il en ville ?
— Tu n'étais pas le seul, le mois dernier, toute
la brigade est restée branchée plusieurs jours en attendant le retour du
courant. En réparant les conduites d'une maison inhabitée, j'ai rencontré un
watt-bot qui m'a dit que la centrale électrique était au bout du rouleau.
— Qu'attendent-ils tous ces watt-bots pour en
fabriquer une nouvelle ?
— Ils ont été conçus, comme nous, pour réparer.
Seuls les humains savaient construire.
— Sans l'électricité, comment allons-nous nous
recharger chaque nuit ?
Le plomb-bot n'avait pas la réponse, mais tous deux
pensaient à la même chose.
Ils ignoraient aussi que le nombre de nouveaux robots
diminuait d'année en année, dépassés par ceux qu'on devait recycler. Dans le
natorium qui les fabrique, les machines tombent en ruine et, ils ne savent pas
en créer des neuves.
Tôt ou tard, la ville allait voir disparaître ses
princes, ceux qui avaient continué à la faire vivre après l'extinction des
humains.
— Mais à quoi servons-nous, pourquoi réparer
sans cesse ces maisons vides qui finiront un jour par s'écrouler ?
— Parce que c'est notre destin, toi de ravauder
la plomberie, les watt-bots l'électricité. Nous avons été conçus ainsi dans le
natorium, et personne ne pourrait nous arrêter, sauf l'absence de courant.
— Et toi, quel est ton destin ?
— Je suis un jardi-bot qui cultive le jardin de
ses maîtres.
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